Santé

Environnement et santé : quels liens ?

Le 22 juillet 2009, Thierry Morfoisse, chauffeur d’une usine de déchets des Côtes d’Armor, effectue un dernier chargement d’algues en décomposition sur la plage de Binic, dégageant de fortes quantités d’hydrogène sulfuré. Sa mission terminée, il repart au volant de son camion, roule une dizaine de mètres et s’écroule terrassé par une crise cardiaque.

Question : les algues en décomposition sont-elles responsables de la mort du chauffeur ? Certains experts disent oui, considérant que l’inhalation d’hydrogène sulfuré est éminemment toxique pour le muscle cardiaque. L’affaire, aujourd’hui en justice, témoigne de l’importance du lien entre l’exposition à des substances toxiques et la santé de l’homme.

Cela étant posé, reste à déterminer les responsabilités. Le développement des algues sur le littoral breton –dont les surfaces en 2008 étaient 40 % supérieures à la moyenne des différentes années entre 2002 et 2007- est étroitement lié au taux de nitrates dans le milieu marin, en provenance des cours d’eau aboutissant en mer. L’origine des apports de nitrates dans le milieu marin, résultent essentiellement des pratiques d’agriculture intensive forte productrices de nitrates qui finissent dans les rivières, y dépassant largement les 10 mg/l autorisés. www.parc-marin-iroise.fr

Allergies, maladies neurodégénératives (Alzheimer, maladie de Parkinson), cancers, baisse de la fertilité masculine … autant de troubles qui semblent avoir un lien avec la qualité de l’environnement.

L’Organisation Mondiale de la santé s’inquiète du boom des allergies dans tous les pays industrialisés. En France, on compte 25 % de plus de maladies allergiques tous les 10 ans. L’asthme, par exemple, a augmenté de plus de 40 % chez les ados en moins de 20 ans. Des chercheurs de l’INSERM ont étudié la qualité de l’air des écoles et constaté des taux de polluants atmosphériques1 supérieurs aux valeurs guides recommandées de l’OMS.

Il existe davantage de certains types de cancers dans les zones agricoles2 . De façon générale, le nombre de cancers augmente : on en a enregistré 160 000 nouveaux cas en 1980 contre 280 000 en l’an 2000. Arguer d’un meilleur dépistage et du vieillissement de la population ne suffit pas à expliquer cette tendance lourde. les lymphomes et les myélomes ont presque doublé dans le même intervalle de temps, le risque de leucémie chez l’enfant de moins de 5 ans a augmenté de 50 % au cours de la dernière moitié du siècle dernier.

En juin 2006, une équipe d’une école de santé publique de Harvard 2 indiquait, à partir d’un échantillon de 143 325 personnes que l’exposition aux pesticides augmentait le risque de maladie de Parkinson de 70 %. Cette affection neurodégénérative a été déclarée maladie professionnelle à diverses reprises.

Enfin, la présence dans l’environnement de perturbateurs endocriniens (on dénombre plus d’une centaine de molécules agissant sur les équilibres hormonaux : parabène, bisphénol, certains pesticides, éthers de glycol…) occasionne des baisses de fertilité, voire des malformations génitales chez le petit garçon.

Agents chimiques (perturbateurs endocriniens, pesticides, métaux lourds, …) ou physiques (bruit, rayonnements électromagnétiques, nanotehcnlologies..), les polluants sont légion. Pour en obtenir une vision globale, le Plan national santé environnement 3 (voir ci-dessous) prévoit l’organisation d’ un groupe de travail appelé « Exposome » .

Le premier plan santé environnement a concerné la période 2004-2008.

Le second (PNSE2) s’est inscrit dans le cadre du Grenelle de l’environnement et s’est déroulé de 2009 à 2013. Il s’articulait autour de deux axes majeurs : la réduction des expositions responsables de pathologies à fort impact sur la santé ; la réduction des inégalités environnementales. 10 actions ont été dégagées du PNSE 2 :

– réduction de l’exposition aux substances chimiques et allergisantes de l’air extérieur
– protection de la qualité de la ressource en eau
– amélioration de la qualité de l’eau distribuée dans les réseaux publics et les réseaux intérieurs
– réduction de l’exposition à l’amiante
– protection des populations, notamment les plus sensibles, des pollutions à l’intérieurs des bâtiments
– organisation et la mise en œuvre de la polltique de lutte contre l’habitat indigne
– identification des zones de cumul d’expositions aux nuisances environnementales et leur impact sur les populations
– maîtrise et la réduction des nuisances sonores à travers l’aménagement du territoire
– prévention des risques auditifs liés à l’écoute de la musique amplifiée
– développement des actions d’éducation à la santé environnementale et la réflexion sur les risques émergents

Retrouvez le PRSE2 sur internet
www.ars.paysdelaloire.sante.fr
www.pays-de-la-loire.developpement-durable.gouv.fr

Le PNSE 3 est en cours d’élaboration. Il est en lien avec des stratégies de santé et de recherche ainsi qu’avec le plan Ecophyto 2018, le plan micropolluants (2010-2013), le plan cancer 3 (2014-2018), le plan santé travail 3 (2015-2019) et le plan chlordécone.

Il doit se décliner sur le plan régional, au niveau de l’Agence régionale de santé, en lien avec la DREAL

FNE Pays de Loire (fédération régionale à laquelle adhère la Sauvegarde de l’Anjou) est membre de la Commission Prévention santé environnement de la Conférence régionale de santé et de l’autonomie, instance stratégique de l’ARS. La CRSA donne son avis sur les modalités d’élaboration, de suivi et d’élaboration de la politique de santé.

Notes
1 – les particules fines de diamètre inférieur à 2,5 micromètre (PM2.5), le dioxyde d’azote (NO2) et 3 aldéhydes (formaldéhyde, acétaldéhyde et acroléine). Les particules fines et le dioxyde d’azote (NO2) proviennent essentiellement de la combustion automobile et peuvent rentrer par transfert (en ouvrant les fenêtres) à l’intérieur des locaux. Les aldéhydes sont des polluants intérieurs issus de nombreuses sources: les produits de combustion (cigarette, bougies, encens, cheminée, cuisinières à gaz), de construction et de décoration (bois, parquets stratifiés, des colles de moquettes, des papiers peints, mais également des vernis, des mousses isolantes), d’entretien (détergents, désinfectants, lingettes) et de traitement (insecticides)…
2- L’étude de la cohorte française AGRICAN Supplément. La revue du Praticien vol. 57 15 juin 2007
3- Pesticides exposure and risk of Parkinson’s disease, Annal of neurology, 60, 2006, p. 197-203