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Site patrimonial remarquable d’Angers : avis favorable avec des périmètres perfectibles

Réclamé de longue date par la Sauvegarde de l’Anjou, le processus de désignation du site patrimonial remarquable d’Angers est bien engagé. Il a fait l’objet d’une enquête publique achevée le 3 juillet 2018. La Sauvegarde y a fait connaître son soutien au projet et émis plusieurs remarques quant au périmètre du plan de valorisation de l’architecture et du patrimoine, qu’elle juge perfectible, et quant à la suite du processus.

Crédits photo : Manuela Tertrin

La Sauvegarde de l’Anjou a pris connaissance du dossier d’études et du projet de périmètre pour le Site Patrimonial Remarquable (SPR) d’Angers.

Elle tient d’abord à souligner sa satisfaction de voir enfin mise en chantier la réalisation d’une telle démarche qu’elle a constamment demandée depuis des décennies. Très attachée à la défense du patrimoine dans une ville remarquable de ce point de vue, elle attend que le SPR apporte enfin un support public à celle-ci.

Elle constate également avec satisfaction que les périmètres du SPR, tant celui du PSMV que celui du PVAP, définis à partir d’études d’une grande qualité, embrassent des aires assez conséquentes, ouvrant la voie d’une protection globale du patrimoine de la ville dans sa diversité.

Elle souligne enfin la place donnée au monde associatif dans cette phase des travaux, qui a beaucoup contribué à la qualité de ceux-ci.

Sur ces bases et à l’issue de cette étape, la Sauvegarde de l’Anjou tient aussi à émettre quelques observations :

1. Sur les périmètres :

Sans remettre en cause ceux-ci, on observera :

a. PSMV :

On ne peut qu’approuver le périmètre du PSMV incluant, au-delà du centre historique intramuros, le quartier de l’Esvière d’origine antique ainsi qu’une partie des extensions résidentielles du XIXe siècle entre le jardin du Mail et la place André-Leroy, d’une  qualité urbanistique et architecturale indéniable.

On peut regretter quelques absences : les lotissements spectaculaires en rive sud de l’avenue Jeanne d’Arc, auraient pu mériter d’être traités dans le PSMV et pas seulement dans le PVAP ; aussi, leur traitement dans ce cadre demandera une attention toute particulière, en front de ce qui fut la promenade préférée des Angevins depuis le 17è siècle.

b. PVAP :

Une amélioration des limites de périmètres nous parait nécessaire

– dans le secteur Saint-Serge/Boreau, la Cité ouvrière de Contades constituée de 36 maisons et construite à l’initiative du vicomte de Contades sur le site de l’hôtel Boreau de la Besnardière, au nord de l’abbaye Saint-Serge, qui est d’ailleurs inscrit dans l’annexe patrimoniale du PLUi.

– Dans le secteur Saint-Léonard-Lilas, les rues de Charnacé et de la Devansaye, en cohérence avec la rue des Lilas, ces trois rues constituant sur l’axe de la rue Saint-Léonard un bon exemple d’unité urbanistique associée à des fronts bâtis homogènes mais divers car réalisés dans la durée : habitat XIXe pour la rue de Charnacé, front pair de maisons Art Déco et front impair de maisons basses en retrait sur jardins des années 1950-1960 pour la rue de la Devansaye.

– Dans le secteur sud-ouest de la gare Saint-Laud, plusieurs immeubles 27-31 rue Bougère et 32-38 rue Audusson pour retrouver la cohérence des lotissements homogènes des années 1950.

– Dans la Doutre, la partie nord de la rue Barra qui conserve des éléments patrimoniaux originaux de l’Entre-deux-guerres : l’ensemble HBM des Petites Pannes, à caractère pittoresque avec son faux pan-de-bois, les communs du grand séminaire, ou la petite maison en bois « russe » du passage Barra…

On peut regretter l’absence de quelques autres secteurs plus vastes :

– Au nord, les secteurs Boreau-Ney et Chalouère, qui forment le répondant populaire et industrieux des quartiers cossus du sud et participent de ce fait à l’identité socio historique de la ville d’avant-guerre. Ces quartiers sont assez touchés par la rénovation urbaine ;

– le quartier début XXe et Art déco de Saint-Antoine des rues Leroy-Béranger-Ronsard, avec son église paroissiale et l’imposante maison de maître du 18e siècle, ainsi que la partie pittoresque à l’entrée de la rue des Banchais (hauts murs de soutènements en schiste, abondante végétation de jardins suspendus…) et au sud-ouest les restes bâtis du hameau de Pierre-Lise, rue Gâte-Argent/avenue Pasteur, ainsi qu’une base de moulin, l’une des dernières traces de la meunerie à vent très développée au XIXe siècle autour d’Angers.

– Ainsi que quelques autres secteurs dignes d’intérêt mais trop éloignés : le secteur Madeleine (partie orientale qui garde encore quelques maisons du faubourg du 18e) et le secteur Blaise-Pascal avec ses maisons-castels évocatrices d’un habitat suburbain de qualité, sans compter l’église paroissiale de la Madeleine et les deux communautés proches, le Notre-Dame du Liéru /Saint-François et la Retraite (collège de la Madeleine)- les ajouts bâtis récents à hauteur des charmants castels 34 et 36 rue Blaise-Pascal montrent la fragilité du secteur.

Ces secteurs n’ont pu être intégrés au périmètre du PVAP notamment pour des raisons de continuité périmétrale, même si la plupart d’entre eux avaient été bien repérés par le comité de pilotage. Aussi, sur tous ces secteurs, comme sur l’ensemble de la ville, il serait vivement souhaitable qu’à l’occasion de sa prochaine révision, le PLUi propose un volet règlementaire plus satisfaisant pour les édifices et ensembles répertoriés dans son annexe patrimoniale. La Sauvegarde de l’Anjou l’avait déjà signalé en son temps pour le PLUi. Le rapport de synthèse d’AUP convient par ailleurs de cette faiblesse, p. 40 :

« L’identification au PLUi (des éléments patrimoniaux) a pour effet de rendre obligatoire le permis de démolir et des prescriptions insistant sur la notion de cohérence avec l’ensemble environnant. Ces dispositions n’interdisent pas leur démolition mais font valoir l’intérêt de leur conservation, tout en permettant des adaptations ou modifications encadrées par un objectif clairement affiché de mise en valeur.

En revanche, la possibilité de démolition reste probablement trop ouverte par les dispositions telles qu’elles sont rédigées ; la mention du caractère exceptionnel de cette action aurait le mérite de mieux afficher la volonté initiale de conserver ce patrimoine. Ainsi, l’outil à mettre en place doit permettre de renforcer la démarche initiée avec le PLUi en y apportant une ambition plus forte en termes de protection de l’architecture et en termes de paysage urbain

2. Sur la phase à suivre de définition des contenus du PSMV et du PVAP :

Nous abordons une longue phase d’études de détails d’un intérêt, d’un volume et d’un enjeu considérables. Aussi, la Sauvegarde de l’Anjou souhaite que celle-ci se déroule avec les meilleurs atouts.

Il est souhaitable qu’un nombre étendu de personnalités compétentes y soient associées. On soulignera la richesse de connaissances portées par les associations patrimoniales d’Angers (Sauvegarde de l’Anjou, Renaissance de la Doutre, Association du vieil Angers, Amis de la Cité…). C’est aussi le cas des associations d’habitants dans les quartiers. La diversité des secteurs et des sujets justifie de les mobiliser, ce qui permettra de renforcer la co-construction et l’appropriation des richesses patrimoniales.

La phase de définition du périmètre a montré la richesse de ces travaux partagés. Dans la tâche étendue d’établissement du PSMV et du PVAP, la Sauvegarde de l’Anjou souhaite que leur participation soit portée au minimum à quatre membres dans chacun des comités de pilotage. Une information régulière de la population doit pouvoir être assurée, notamment via un site internet dédié, lequel pourra par exemple intégrer les riches données du Service de l’Inventaire et préciser aux propriétaires les avantages fiscaux dont ils vont pouvoir bénéficier.

Par ailleurs, nous nous interrogeons sur la gestion des deux périmètres pendant la phase d’étude du PSMV et du PVAP. Les études réalisées pour la définition du périmètre constituent déjà une base de qualité pour l’instruction des projets. Les dépositions à l’enquête publique apporteront certainement aussi des éléments complémentaires que nous souhaitons voir également pris en compte. Enfin, il nous semble important de préciser la manière dont un suivi en continu sera assuré sur leur application.

D’autre part, les apports des études de la démarche en cours justifieraient une mise à jour des éléments patrimoniaux portés au PLUi –soit par ajout de certains éléments ou secteurs, soit par complément d’orientations les concernant-, qu’il nous parait souhaitable de voir cette révision réalisée assez vite. Dans l’attente, il nous semble indispensable que les éléments d’étude et de recommandations du dossier d’étude soient systématiquement utilisés et référencés par les instructeurs du droit des sols, ainsi que les observations figurant aux conclusions de l’enquête publique et dans les contributions qui y seront jointes.

Enfin, la Sauvegarde de l’Anjou, fédération qui s’attache autant à la préservation du patrimoine et qu’à celle de l’environnement, insiste sur la recherche de convergence maximale entre les enjeux écologiques, climatiques et patrimoniaux. L’élaboration du SPR doit être l’occasion de proposer des outils permettant des éco-rénovations respectueuses du bâti, d’intégrer l’approche paysagère avec notamment la préservation des arbres remarquables qui sont souvent des traces de la riche histoire des jardins et pépinières de la ville, de veiller à l’intégration de la nature en ville (les « vieux murs » de schistes étant par exemple de véritables réservoirs de biodiversité…) ; de favoriser dans les quartiers historiques les déplacements à pied et en vélo plus respectueux de l’esprit des lieux, etc.

Le transfert d’expériences issues d’autres territoires et la constitution d’un réseau d’artisans et de professionnels formés et informés sur les bonnes pratiques constituent des enjeux majeurs pour les années à venir, afin de rendre accessible la démarche globale de l’écorénovation et de démultiplier les projets de réhabilitation sur le futur SPR d’Angers. La ville patrimoniale doit également être durable et la Sauvegarde de l’Anjou se propose d’y contribuer.

En conclusion, la Sauvegarde de l’Anjou émet un AVIS FAVORABLE à la délimitation du périmètre du Site Patrimonial Remarquable d’Angers, sous réserve que soient prises en comptes les observations émises ci-dessus.

Le Président
Yves LEPAGE

 

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